Rapport annuel de l’Observatoire des expulsions (2020-2021)

 

En France, aujourd’hui, des milliers de personnes sont contraintes de vivre dans des habitats de fortune : des bidonvilles, des squats, des tentes … Chaque année, de nombreuses expulsions viennent les précariser davantage.

Dans son nouveau rapport annuel, l’observatoire inter-associatif des expulsions collectives de lieux de vie informels a recensé 1330 expulsions du 1er novembre 2020 au 31 octobre 2021, en France métropolitaine.

UNE HAUSSE RECORD MALGRE UN CONTEXTE PARTICULIER

Malgré un contexte sanitaire incertain, des périodes de couvre-feu et de confinement, et le déploiement de la crise sanitaire, cette année est marquée par une hausse de 23% des chiffres de l’année dernière.

 

DES TERRITOIRES PARTICULIEREMENT TOUCHES PAR LES EXPULSIONS 

Les villes du Calaisis (Calais, Marck, Coquelles) et Grande Synthe comptabilisent à elles seules 1024 expulsions soit 77% des expulsions. Les villes du Calaisis et la ville de Grande-Synthe se démarquent par la fréquence des expulsions, montrant une véritable politique d’expulsion spécifique à ce territoire, s’apparentant à un véritable harcèlement des personnes exilées où les pouvoirs publics ne s’efforcent même plus de justifier ces pratiques.

La Gironde et l’Ile-de-France sont également des territoires particulièrement concernés par les expulsions de lieux de vie informels. 95 expulsions ont été observées cette année dans le département de la Gironde, et 86 en Ile-de-France. En dehors des villes du Calaisis et de Grande-Synthe, la Gironde et l’Ile-de-France représentent respectivement 31% et 28% des expulsions.

DES EXPULSIONS TOUJOURS VIOLENTES 

L’Observatoire constate encore, que certaines expulsions sont particulièrement violentes.

Si se faire expulser de son habitation constitue déjà une violence en soi, certaines expulsions le sont encore davantage, notamment du fait du comportement des forces de l’ordre à l’égard des personnes expulsées : menaces et insultes, harcèlement, allant jusqu’à des atteintes physiques. Alors que les biens des personnes expulsées sont censés être protégés et doivent pouvoir être récupérés, ils sont souvent détruits ou confisqués.

DES CONSEQUENCES DESASTREUSES 

Les expulsions ont des conséquences désastreuses sur la vie des habitant·e·s de lieux de vie informels.

En grande majorité, elles ne sont pas anticipées par un diagnostic social, et ne permettent pas de prendre en compte les situations de vie des personnes. Elles viennent détruire tout le travail d’insertion des habitant·e·s : interrompre leurs parcours, professionnel, de soin, ou la scolarisation des enfants. Les actions d’accompagnement (social, médical, etc.) menés par les associations, souvent mandatées par l’Etat sont mises à mal également.

DES PROPOSITIONS RARES APRES L’EXPULSION 

Dans 91% des expulsions recensées, aucune proposition d’hébergement ou de relogement n’a été faite aux personnes expulsées, ce qui signifie qu’une partie ou l’ensemble des personnes qui vivaient dans les lieux expulsés a été remis à la rue.

Lorsque des propositions sont faites, elles relèvent en majorité d’une mise à l’abri temporaire dans des hôtels sociaux, des structures d’hébergement d’urgence, des centres d’hébergement type CAO et CAES, voire des gymnases. Il s’agit donc de solutions non pérennes, qui ne permettent pas aux personnes concernées de sortir durablement de la précarité, où les possibilités d’accompagnement sont particulièrement limitées.

Il est urgent de sortir de cette politique d’expulsion, inefficace depuis des années, et qui ne permet ni la disparition des lieux de vie informels, ni de la précarité des personnes y habitant.  

Aucune expulsion ne devrait avoir lieu sans accompagnement en amont des habitant et sans que des solutions pérennes et concertées avec ces dernier.e.s ne soient proposées !