La Ville de Lille et l’État condamnés pour l’expulsion illégale des habitants d’un bidonville

Paris, le 9 février 2018

La Ville de Lille et l’État ont été condamnés le 6 février par le juge des référés du tribunal de grande instance de Lille à réparer le préjudice causé par l’expulsion illégale, le 3 novembre 2017, de 15 personnes vivant dans un bidonville. Cette décision rappelle que les propriétaires de terrains, quels qu’ils soient, ne peuvent porter atteinte au droit de toute personne à la protection de son domicile mais doivent recourir à l’intervention du juge comme prévu par la loi.

Plusieurs familles en situation de précarité – dont celle qui a porté l’affaire en justice – avaient été expulsées par les polices municipale et nationale, sans qu’aucune décision de justice ne l’ait ordonné, alors qu’elles habitaient ce terrain vide (propriété de la Ville de Lille) depuis trois semaines, faute d’une autre solution de logement digne.

Cette décision sanctionne la pratique, trop fréquente, des expulsions de bidonvilles réalisées sans autorisation de la justice, y compris pendant la trêve hivernale, et que les autorités prétendent à tort justifier en alléguant un « flagrant  délit».

 Ces dérives s’inscrivent dans une logique récurrente d’expulsions de bidonvilles,  qui prive leurs habitants du peu de stabilité qui avait pu s’y instaurer, de leurs biens et du lien avec ceux qui les  accompagnent, les renvoyant ainsi à des conditions de vie plus précaires encore. Plus de 11 300 personnes ont été expulsées de 130 lieux de vie en 2017, d’après l’enquête LDH-ERRC, pour une estimation de 570 de bidonvilles (selon la DIHAL).

La seule politique acceptable est de proposer des solutions de logement dignes à ces enfants, ces femmes, ces hommes, dont aucun n’a choisi de vivre dans ces conditions. C’est la précarité qu’il faut combattre, et non les personnes qui en sont les victimes.

L’instruction du gouvernement du 25 janvier 2018 « visant à donner une nouvelle impulsion à la résorption des campements illicites et des bidonvilles », et adressée à l’ensemble des préfets du territoire, annonce cette intention, en donnant pour objectif la résorption des bidonvilles par l’accompagnement des personnes et non plus dans une logique contreproductive d’expulsion : il est impératif qu’elle y parvienne.

Les associations signataires, qui sont intervenues aux côtés des habitants devant le juge, continueront de veiller avec vigilance au respect des droits des personnes menacées d’expulsion.

 

Crédit photo : Simond Colaone