Décision du Défenseur des Droits en date du 9 mars 2017

 

Le Défenseur des Droits a rendu une décision contre le commissariat du 6ème arrondissement de Paris pour discrimination à l’encontre de personnes roms. Il formule donc un rappel à la loi à la Commissaire et exige l’émission d’une note aux fonctionnaires de police pour le respect du principe de non-discrimination. Lire la décision

 

SYNTHESE DE L’AFFAIRE

 

  • Le 15 avril 2014, le CNDH Romeurope dépose une réclamation relative à une consigne (en date du 11 avril 2014) diffusée à l’attention des effectifs d’un commissariat de police parisien, avec deux demandes aux agents :

 

  1. Évincer systématiquement les familles roms vivant dans la rue
  2. Recenser leurs lieux de présence sur la voie publique

 

LA DÉFENSE DE LA POLICE

 

L’argument des instructions hiérarchiques : utilisé par la commissaire (Mme X.) et le major rédacteur de la consigne (M. Y). Argument contredit par Mme X. qui plaide la rédaction maladroite de consignes orales, par exemple l’emploi de « termes inadaptés tels que « évincer systématiquement » » (rapport de la commissaire au DDD).

L’argument de l’objectif social (M. Y.) : il s’agirait de repérer les familles en détresse et d’aider les jeunes mineurs en danger, ne pas laisser à la rue de très jeunes enfants ainsi que de faciliter la coopération entre différents acteurs (Samu Social, services de l’enfance, Mairie, protection des animaux). Cet argument est appuyé par le cas de la famille Z., observée se livrant à la mendicité avec les enfants, cas particulier cité dans une consigne du 9 avril sans mention de leur origine. Cette consigne du 9 avril visait la protection des enfants de cette famille.

L’argument (Mme X.) de l’annulation de la consigne dès le lendemain, déclarée « nulle et non avenue ».

 

L’ARGUMENTAIRE DU DÉFENSEUR DES DROITS

 

Selon le Défenseur des Droits le cas particulier de la famille Z. a été monté en généralité pour le traitement de la communauté rom dans son ensemble, ce qui constitue une discrimination au titre de l’article 225-1 du code pénal.

Les contradictions entre M. Y. et Mme X. quant à la maladresse de rédaction de l’expression « évincer systématiquement » rendent cet argument caduc.

Le recensement des lieux de présence de Roms sur la voie publique contrevient à la loi « Informatique et Libertés » qui interdit de recueillir et d’enregistrer des informations qui font apparaître des origines «raciales » ou ethniques.

En conclusion le Défenseur des droits relève le caractère discriminatoire et sans fondement légal des consignes émises le 11 avril 2014.

 

RECOMMANDATIONS

 

  1. Rappel à la commissaire de police centrale de l’arrondissement Mme X. :

 

  • de l’article R. 434-11 du code de sécurité intérieure: « le policier et le gendarme accomplissent leurs missions en toute impartialité. Ils accordent la même attention et le même respect à toute personne et n’établissent aucune distinction dans leurs actes et leurs propos de nature à constituer l’une des discriminations énoncées à l’article 225-1 du code pénal) »
  • de l’article 40 du code européen d’éthique de la police : « la police doit mener à bien ses missions d’une manière équitable, en s’inspirant en particulier des principes d’impartialité et de non-discrimination»

 

  1. Exige l’émission d’une note à l’attention des fonctionnaires de police du commissariat concerné rappelant leur devoir d’exécuter leurs missions dans le respect du principe de non-discrimination.

 

  • Demande au ministre de l’Intérieur (conformément à l’article 25 de la loi n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits) de rendre compte des suites données aux recommandations ci-dessus dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la présente décision.