Note du CNDH Romeurope et du Collectif Solidarités Roms 31

Le 26 août 2016

Les 25 et 26 juillet 2016, 386 personnes vivant dans 4 bidonvilles situés dans le quartier de Montaudran à Toulouse ont été relogées dans des appartements appartenant à la commune, à Toulouse Métropole et à l’établissement public foncier local de Toulouse.

Alors que la plupart des expulsions des habitants de bidonvilles et squats en France se soldent par une mise à la rue, ou, au mieux, quelques nuits d’hôtels pour les personnes vulnérables, à Toulouse, ce n’est pas la première fois qu’une opération de relogement est mise en place. En effet, en septembre 2015, 150 personnes vivant dans un bidonville sur l’Ile du Ramier étaient relogées. Par son ampleur, cette opération revêt un caractère exceptionnel et qui devrait inspirer de nombreuses collectivités ainsi que les services déconcentrés de l’Etat.

Préparée depuis dix mois dans le cadre d’un Maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (Mous) menée par la ville de Toulouse et la préfecture de Haute-Garonne, cette opération de relogement s’inscrit dans un contexte juridique particulier puisque le tribunal de grande instance de Toulouse en septembre 2015 et la Cour d’Appel de Toulouse le 4 novembre 2015 ont dans un premier temps rejeté la demande d’expulsion des propriétaires, considérant que sans solutions de relogement, elle violerait les droits fondamentaux des habitants. Dans le cadre d’une deuxième procédure judiciaire à l’encontre des habitants, les propriétaires ont donc préparé leur demande d’expulsion en prévoyant des solutions de relogement en amont (lire ici la décision de justice) ce qui a permis au juge d’autoriser l’expulsion, au nom du respect du droit de propriété.

Ce n’est pas moins de 178 chambres réparties dans 74 appartements qui ont été mises à disposition pour reloger les habitants des bidonvilles. Dans le détail ce sont 22 appartements appartenant à l’Etablissement public foncier local du Grand Toulouse, 25 appartements à la ville de Toulouse, un appartement à Toulouse Métropole, 6 à la SEM Oppidea et 66 à quatre bailleurs sociaux différents. Une partie des appartements des bailleurs sont loués directement par la mairie.

Des travailleurs sociaux et des interprètes étaient présents lors des deux jours de l’opération. De plus, pour que cette expulsion se passe dans les meilleures conditions, les propriétaires ont mis à disposition de chacune des familles des cartons de déménagement, des camions et des minibus avec chauffeurs.

Néanmoins certains points nécessitant d’être améliorés à l’avenir :

– Pour éviter les risques de ruptures de soins ou de démarches administrative, une coordination avec les associations présentes depuis des plus de 3 ans sur le terrain aurait été nécessaire ;

– Des informations auraient dues être délivrées aux habitants :
o En amont, sur les inscriptions scolaires de la rentrée ;
o Sur la durée du relogement et le type d’accompagnement social ;

Le déficit d’informations a en effet entraîné une importante perte de repères pour certaines personnes (des personnes ont été incapables de retrouver leur logement le lendemain de l’expulsion).

– Sans attendre l’expulsion, des hébergements d’urgence auraient dû être fournis aux familles qui depuis déjà 10 mois sollicitaient sans succès le 115 ;

– Enfin, des solutions doivent également être proposées aux familles d’autres squats ou terrains en instance d’expulsion.

Ce type d’opération nécessite une bonne dose de volonté, quelle que soit la couleur politique. Mais c’est une décision qui fait sens pour plusieurs raisons : elle est conforme au droit européen qui exige un respect des droits fondamentaux des personnes, elle permet de rompre avec le cercle coûteux et inutile d’expulsion des bidonvilles. Il est évident que si ces personnes avaient été expulsées sans solution de relogement, elles se seraient ré-installées quelque part sur le territoire toulousain, encore plus précarisées.

Il est temps de penser de nouvelles politiques de résorption des bidonvilles, et l’exemple de Toulouse nous montre à toutes et tous que des solutions sont possibles.

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