-* Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, rendues le 24 juin 2016 par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, ONU.
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Le comité DESC veille au respect et à la mise en oeuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) par les Etats qui l’ont ratifié dont la France. Périodiquement, il examine la situation dans ces différents Etats, sur la base d’un rapport périodique transmis par le gouvernement quant au respect et la mise en oeuvre des dispositions du Pacte, en tenant compte également des rapports soumis par la société civile.

Début juin, le rapport de la France était examiné par les experts indépendants de ce comité. Un rapport alternatif avait été soumis par plusieurs associations, réunies au sein de la plateforme DESC. Voici ci-dessous les recommandations du comité faites à l’Etat français sur le droit au logement.

Lire les observations finales du Comité DESC en entier

A lire aussi : le fascicule des Nations Unies sur « Le droit à un logement convenable ».

Droit au logement

35. Le Comité déplore l’insuffisance des moyens investis pour soutenir les politiques de l’État partie visant à réaliser le droit à un logement suffisant. Il demeure préoccupé par la pénurie de logements, y compris de logement sociaux, abordables et d’hébergements d’urgence, dans l’État partie, et il note avec préoccupation le nombre toujours élevé de personnes sans domicile fixe et l’apparition de nouveaux quartiers d’habitat informel qui en découlent. Il juge également préoccupant que plus de 40 pour cent des demandes d’hébergement d’urgence n’ont pas reçu de réponses et que dans 80 pour cent des cas, les solutions d’hébergement étaient d’une nuit.

36. Le Comité observe que le plan de production de logements prévu dans le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale ne satisfait pas aux besoins en solutions pérennes de logement. Il attire l’attention de l’État partie sur les conséquences négatives du déni du droit au logement sur l’exercice d’autres droits, tels que le droit à la sécurité sociale ou le droit au travail (art. 11).

37. Attirant l’attention de l’État partie à son observation générale nº 4 (1991) sur le droit à un logement suffisant, le Comité exhorte l’État partie à:

a) Investir, sur la base d’une priorisation géographique, des ressources proportionnelles à l’ampleur de la pénurie de logement ;

b) Accorder la priorité voulue aux personnes sans domicile fixe à travers une stratégie élaborée en consultation approfondie avec les intéressés, visant l’éradication du sans-abrisme et surtout l’accompagnement des individus vers des solutions de logement pérennes, leur permettant d’exercer les autres droits visés par le Pacte ;

c) Lever certains obstacles à l’accès au logement prévus par la loi DALO comme la régularité de séjour ;

d) Réexaminer l’adéquation des procédures administratives d’accès et des critères d’éligibilité au logement social et aux aides au logement ainsi que de leur montant ;

e) Établir un calendrier et des objectifs en matière de réquisition de logements vacants ;

f) Étendre la mise en place du système d’encadrement de loyer dans les villes où cela est jugé nécessaire ; et

g) Instaurer des mécanismes de domiciliation permettant aux personnes sans domicile fixe ou sans adresse de ne pas être exclues, pour ce motif, de l’accès aux droits sociaux.

Expulsions forcées

38. Le Comité regrette les insuffisances constatées dans la mise en œuvre de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage (dite « Besson II »), le taux de réalisation effectif des aires d’accueil demeurant inférieur aux objectifs fixés dans les schémas départementaux d’accueil des gens du voyage. Il prend acte de ce que les préfets disposent d’un pouvoir de substitution leur permettant de pallier les éventuelles insuffisances des municipalités. Le Comité est également préoccupé par le nombre de décisions d’expulsions forcées adoptées dans l’État partie, qu’il s’agisse d’expulsions locatives, d’expulsions de quartiers d’habitat informel ou encore de camps occupés par des membres de la communauté Rom ou les gens du voyage. Il observe également avec inquiétude que dans beaucoup de cas, ces expulsions ont été conduites sans solutions de relogement (art. 11).

39. Le Comité demande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour réduire autant que possible le recours aux expulsions forcées en envisageant les autres solutions en concertation avec les intéressés. Le Comité exhorte également l’État partie à

a) Donner un délai de préavis suffisant et raisonnable à toutes les personnes concernées par des décisions d’expulsion et les informer systématiquement des voies de recours ;

b) Empêcher l’expulsion des personnes reconnues prioritaires par la loi DALO ;

c) Différer l’exécution des décisions d’expulsion de ménages avec des enfants scolarisés ;

d) Veiller à ce que toute expulsion soit accompagnée de solutions de relogement ou de réinstallation adaptées ; et

e) Éviter le recours à la force, ou du moins d’en limiter la nécessité lors des expulsions.

40. En outre, le Comité recommande qu’une évaluation soit faite de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites et que des ressources soient affectées à la réalisation effective des objectifs fixés dans les schémas départementaux d’accueil des gens du voyage. Le Comité réfère l’État partie à ses observations générales nº 4 (1991) sur le droit à un logement suffisant et nº 7 (1997) sur les expulsions forcées.